LA RETRAITE DU TRADUCTEUR

Trop jeune pour y penser ? Détrompez-vous ! Le vieillissement des très nombreux baby-boomers met en péril le système de retraite par répartition dans la plupart des pays occidentaux. Contrairement à ce que voudraient nous faire croire nos politiciens (souvent plus âgés que nous), la France n’échappera pas à la flambée des cotisations et au déficit, voire à la faillite, des caisses de retraite. Sachez en outre que vos maigres cotisations de professionnels libéraux sont déjà bien loin de vous garantir une retraite dorée. Comme la plupart des chefs d’entreprise, vous devrez donc économiser si vous souhaitez arrêter de travailler avant votre mort, autant donc regarder dès aujourd’hui la situation en face et prendre les mesures nécessaires…

 

LE POINT SUR LA SITUATION ACTUELLE

Les traducteurs sont des professionnels libéraux, leur retraite est donc administrée par la CNAVPL (Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales) à laquelle sont rattachées dix caisses distinctes (les sections professionnelles) assurant pour son compte le recouvrement des cotisations et le service des prestations du régime. La section professionnelle des traducteurs s’appelle la CIPAV (la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse des professionnels libéraux). En prévision de votre future retraite, vous cotisez obligatoirement à un régime de base et à un régime complémentaire.

Auto-entreprises

Si vous êtes auto-entrepreneur, vos cotisations au régime de base et au régime complémentaire sont calculées sur le total des recettes de votre entreprise, donc versées seulement si vous réalisez un chiffre d’affaires. Mais pour pouvoir effectivement valider des trimestres de retraite, votre chiffre d’affaires (après déduction d’un abattement forfaitaire de 34 %) doit dépasser certains seuils :

Activité Validation 1 trimestre Validation 2 trimestres Validation 3 trimestres Validation 4 trimestres
Prestations de service BNC et activités libérales 2 166 € 4 332 € 6 498 € 8 664 €

Suite à la réforme de l’auto-entreprise, ces seuils ont été abaissés en mars 2014. Pour vérifier si vous avez rempli ces conditions depuis la création du régime en 2010, visitez le site myAE.fr.

En février 2014, un rapport de la Cour des comptes a relevé dimportantes irrégularités dans la gestion des retraites des auto-entrepreneurs par la CIPAV. Cette dernière n’aurait notamment pas inscrit leurs cotisations sur ses comptes et donc pas enregistré leurs droits à la retraite ! Encore plus grave, elle semblerait minorer les droits à la retraite complémentaire des auto-entrepreneurs en leur attribuant un nombre de points de retraite inférieurs à ceux auxquels ils pourraient prétendre. Pour remédier à la situation, la Cour des comptes a émis des recommandations urgentes afin que les droits à la retraite des auto-entrepreneurs soient régularisés, mais dans sa réponse à ce rapport le président de la CIPAV a préféré tout nier en bloc et demander la création d’une caisse autonome de retraite spécifique à la population (sic) des auto-entrepreneurs.Face à cette attitude déplorable, les associations professionnelles s’organisent. Si vous souhaitez exprimer votre mécontentement, adressez-vous à la Fédération des auto-entrepreneurs (FEDAE).

 

Autres entreprises individuelles

 

Pour les autres traducteurs indépendants, le régime de retraite de base repose sur un principe de cotisation en deux temps : la cotisation provisionnelle et la régularisation (cotisation définitive). Vous cotisez à ce régime en fonction de vos revenus de l’année N-2 ou en fonction du revenu estimé pour l’année en cours si vous venez de créer votre entreprise. Si votre revenu professionnel 2014 s’avère supérieur au revenu anticipé, une majoration sera appliquée lors de la régularisation de votre cotisation 2014, en 2016 (majoration de 5 % si le revenu définitif est inférieur ou égal à 1,5 fois le revenu estimé et majoration de 10 % si le revenu définitif est supérieur à 1,5 fois le revenu estimé).

La retraite de base des professions libérales présente en outre une particularité : depuis 2004 et contrairement à la plupart des régimes de base, c’est un régime à points. Ces points sont acquis par une cotisation répartie en deux tranches :

  • la tranche 1 correspond à la partie du revenu inférieure à 85 % du plafond de la Sécurité sociale et sur laquelle vous versez une cotisation de 10,10 % en 2014. Cette cotisation donne droit à un maximum de 450 points. Le plafond de la Sécurité sociale s’élevant en 2014 à 37 548 € par an, la tranche 1 correspond donc au revenu inférieur à 85 % de cette somme, soit 31 916 €.
  • la tranche 2 correspond à la partie du revenu allant de 85 % à cinq fois le plafond de la Sécurité sociale (soit de 31 916 € à 187 740 € en 2014). Le taux de cotisation affecté à cette tranche est de 1,87 % cette année et donne droit à un maximum de 100 points.

Pour les périodes antérieures à 2004 (avant la mise en place du régime actuel à points), 100 points sont attribués par trimestre cotisé.

Le montant de la retraite des professions libérales est calculé suivant trois paramètres : le nombre de points acquis, la valeur du point et le taux de liquidation. Sachant que la valeur du point est fixée par décret au 1er avril de chaque année, le taux de liquidation varie selon la durée d’assurance (calculée en trimestres). Ce montant pouvant être réduit par un coefficient de minoration (décote) si vous n’avez pas cotisé le nombre requis de trimestres.

Les conditions pour percevoir une pension de retraite complète sont les mêmes que pour le régime général, soit un âge minimum de départ à la retraite compris entre 60 et 62 ans selon l’année de naissance (pour l’instant !), et entre 65 et 67 ans pour bénéficier du taux plein sans remplir les conditions de durée de cotisation. La durée de cotisation pour prétendre à un taux plein avant 65 ans étant fixée entre 160 et 166 trimestres suivant la date de naissance.

 

LES MOYENS D’ANTICIPER

Vous l’avez sans doute compris : entre une durée de cotisation qui s’allonge et des points dont la valeur à tendance à diminuer, mieux vaut se constituer sa propre cagnotte. Pour cela, différentes solutions s’offrent à vous, mais pour résumer, il faut en retenir trois principales :

 

Le contrat d’épargne retraite dit « Madelin »

 

Le principe de ce placement créé par la loi Madelin est de permettre la constitution d’une retraite complémentaire qui sera restituée sous forme de rente venant s’ajouter aux pensions de retraite obligatoires, tout en offrant une déduction fiscale des primes versées. Autrement dit votre effort d’épargne sera financé en partie par une économie d’impôt.

 

Il existe trois types de contrat retraite Madelin : le contrat monosupport (investi dans des fonds en euros peu rentables, mais totalement sûrs), le contrat multisupport (investi dans des fonds en actions, souvent plus rémunérateurs, mais aussi plus risqués, car dépendant des performances des marchés financiers) et enfin, le contrat en points (qui transforme les sommes versées en points de retraite dont la valeur ne sera connue qu’au moment du départ à la retraite).

 

Le principal avantage du contrat retraite Madelin est la déduction des sommes épargnées de vos bénéfices professionnels, donc plus votre taux marginal d’imposition sera élevé, plus l’économie d’impôts réalisée sera importante. Dans la pratique, les experts en gestion de patrimoine estiment qu’au vu des contraintes, la souscription d’un contrat dans le cadre fiscal de la loi Madelin ne présente un réel intérêt que pour les contribuables dont le un taux marginal d’imposition s’élève au moins à 30 %.

 

En effet, les contraintes sont importantes :

  • Une fois que vous avez adhéré, vous êtes obligé de verser chaque année une cotisation minimum sur votre contrat.
  • Ce type de produit d‘épargne retraite affiche en général un taux de rendement assez faible.
  • C’est un placement « tunnel » qui, sauf quelques rares exceptions, ne peut être débloqué que sous forme de rente à l’âge de la retraite.

 

Le plan d’épargne retraite populaire (PERP)

 

Comme le contrat Madelin, le PERP est un produit d’épargne à long terme qui permet d’obtenir, à partir de l’âge de la retraite, un revenu régulier supplémentaire sous forme d’une rente viagère, mais contrairement à lui, il est ouvert à tous (pas seulement aux travailleurs non-salariés) et peut être reversé sous forme de capital (à hauteur 20 % de la valeur de rachat du contrat ou en totalité pour le premier achat d’un bien immobilier). Le PERP offre surtout l’avantage de n’imposer aucune cotisation minimum, cependant le contrat Madelin est bien plus généreux en terme de déduction fiscale annuelle (maximum 69 464 € contre 30 038 € pour le PERP en 2014).

 

L’assurance vie

 

Si ces contrats « tunnels » relativement contraignants vous font peur, il vous reste toujours le placement favori des Français : l’assurance vie. Ce contrat d’assurance, que les étrangers confondent souvent avec l’assurance décès, permet de faire fructifier des fonds pour un projet à long terme tout en bénéficiant d’un cadre souple et d’avantages fiscaux.

 

Le principal atout de l’assurance vie par rapport aux deux alternatives précédentes est sa flexibilité : pas de cotisation obligatoire, le choix d’une sortie en rente ou en capital, une vaste gamme de supports d’investissement (les unités de compte sur les contrats multisupports peuvent être des actifs financiers de tous types), différents modes de gestion (libre, profilée ou sous mandat) et des frais souvent réduits par une concurrence féroce.

 

Le régime fiscal de l’assurance vie est régulièrement menacé d’être remis en cause, mais reste pour l’instant très favorable aux épargnants. À l’heure actuelle, les gains tirés d’un contrat d’assurance vie sont imposés, mais uniquement en cas de rachat (retrait de fonds), total ou partiel, et ce au prorata des sommes retirées et de la durée de détention du contrat au moment du retrait. Pour un contrat de plus de 8 ans, les rachats annuels sont exonérés d’impôts jusqu’à 4 600 € (9 200 € pour un couple). Au-delà, l’éventuel excédent est intégré au barème de l’impôt sur le revenu, ou, si vous avez choisi le prélèvement libératoire, imposé au taux très avantageux de 7,5 %. En revanche, contrairement au PERP et au contrat de retraite loi Madelin, les versements sur l’assurance vie pendant la phase de constitution de l’épargne ne donnent droit à aucun avantage fiscal.

 

Ces trois différents produits d’épargne peuvent être souscrits auprès des banques, compagnies d’assurance, organismes de prévoyance ou mutuelles. Alors afin d’éviter toute mauvaise surprise à l’heure de remiser vos dictionnaires, faites un point dès aujourd’hui sur votre situation et vos besoins d’épargne pour financer votre retraite !

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