A la foire du livre de Francfort, rendez-vous annuel de l’édition internationale, le célèbre éditeur français Eric Angstrom fait l’évènement en annonçant la parution prochaine du dernier volume de « Dedalus ». Cette série policière, dont l’auteur reste mystérieux, est devenue l’un des plus grands best-sellers du moment, désormais traduit partout dans le monde. C’est dire à quel point cet ultime volet suscite, d’avance, la curiosité. Conscient de détenir un véritable trésor, l’éditeur a décidé de prendre les grands moyens pour maintenir jusqu’au bout le suspense : il fait venir des quatre coins du monde neuf traducteurs triés sur le volet, les réunit dans une somptueux château perdu dans la campagne, et… les y enferme, après avoir confisqué leurs téléphones portables. Désormais coupés du monde dans ce qui devient un véritable bunker, surveillés en permanence par deux gardes-chiourmes soviétiques qui n’ont pas l’air de plaisanter, ces orfèvres réputés de la traduction n’auront d’autre alternative que de se consacrer à leur copie. Pas question de lambiner, la date de sortie du livre est déjà fixée…
Intrigué par cette entrée en matière (inspirée d’un fait réel, la traduction d’« Inferno », de Dan Brown) menée tambour battant, on attend la suite avec déjà quelques frissons. On ne sera pas déçu : très vite, la tension monte dans cet étrange huis-clos. Mais elle vient… de l’extérieur. Via Internet, où un mystérieux pirate commence à diffuser les dix premières pages du manuscrit pourtant tenu au secret dans le bunker cadenassé, et exige, pour ne pas continuer, une rançon astronomique. Il y a un traître dans l’équipe ! Mais qui ? On pense, bien sûr, aux « Dix petits nègres » d’Agatha Christie… Les esprits s’échauffent dans le bunker, la violence commence à monter, alimentée par un Lambert Wilson, qui, dans la peau de l’éditeur diabolique, en fait ici des tonnes, mal tempéré par sa pourtant douce mais très obéissante secrétaire, Sara Giraudeau, et vite honni par les neuf traducteurs prisonniers, tous magistralement interprétés par des acteurs venus du monde entier. Et l’insolite thriller littéraire se mue en incroyable histoire à tiroirs, accumulant les fausses pistes et les retournements de situations au point de frôler le trop plein. A vouloir conjuguer « suspense, polar, arnaque et vengeance », le réalisateur (et scénariste) Régis Roinsard (auteur déjà, en 1992, de « Populaire »), se perd un peu en route…. Et risque de semer un spectateur vite lassé. Il redresse heureusement astucieusement la barre dans la dernière demi-heure, en changeant de registre pour nous mener, via le métro parisien, jusqu’en Bretagne, où l’on a droit enfin à la résolution de l’énigme.
MON AVIS
Une incursion dans le monde de l’édition qui tourne au thriller loufoque avant de s’achever par un coup de théâtre… émouvant. Pas tout à fait maîtrisé, un peu longuet, mais, finalement, divertissant.